Les possibilistes
Le nouveau récit du groupe de pionniers du 27 février 2023
Nous les possibilistes !
C’est un si joli mot qu’on ne devinerait pas qu’il est né un soir, autour de plans de tomates anciennes qui poussaient sous le regard des habitants d’un quartier parisien. Tout ça, c’était entre 2022 et 2023. Ça nous est venu comme ça, comme si c’était normal : se réunir, faire pousser un jardin collectif, s’y retrouver régulièrement. Il y avait nous, Emma, Nicolas, Stéphanie, nos ami.e.s, nos enfants, nos familles et puis tout ceux et celles à qui on en parlait… ça grossissait comme les tomates en été notre histoire de jardin collectif. On s’est mis à y échanger des recettes. Des recettes du monde entier, vu qu’on venait de partout dans le monde dans ce lieu-là.
C’est notre anxiété et cette sensation d’immobilisme qui nous ont mené là. Plutôt que de stresser chacun de son côté, retrouvons-nous. Il y avait un bout de terrain, des plans de légumes et l’envie quand même d’essayer de changer les choses. On était pas convaincus de changer grand chose, mais en tout cas, on ne se sentait plus totalement impuissants… et on faisait pousser de beaux légumes !
Près de 2 ans après la première carotte semée, la programmation du Jardin des Possibles s’étoffe de mois en mois. D’un simple potager, notre lieu est devenu lieu de lien. Bassem qui nous avait tant aidé sur la construction des bacs de culture, s’est totalement révélé à travers ses ateliers cuisine qu’il co-anime avec Bernadette, la reine du quartier. Les saveurs syriennes résonnent avec la folie de notre Mamie Nadette, toutes les semaines.
Les ateliers grainage sont désormais assurés par l’association Kokopelli qui rivalise de créativité pour comprendre la vie des semences paysannes.
Djibril, Moussa et Michel se sont mis en tête de construire la maison des possibles. Encore l’objet d’un chantier participatif pendant lequel nous nous sommes tant amusés, quelques enfants triaient les vis, Marie jouait de la visseuse et les palettes de recul’ arrivaient directement au jardin grâce à la collaboration de sympathique salarié de la supérette d’en face.
A peine 2 ans et demi après sa création, le jardin des possibles était devenu un véritable lieu de vie, ou chacun pouvait vaquer à réaliser ses envies. Des ateliers de sensibilisation au climat, à la biodiversité, au numérique et à la nutrition se multipliaient. A ce stade, il a bien fallu s’asseoir entre possibilistes pour rédiger ensemble les règles de gouvernance. La gestion du lieu a été subdivisée en différentes tâches et chacun à pris sa part, au gré de ses forces et ses envies.
En évoluant, le lieu a fait traverser à ses participants des questionnements qui les ont fait grandir et ont contribué au décloisonnement des sujets.
La municipalité observait avec attention l’évolution de ce lieu de création collective. Dans un premier temps, les élus étaient troublés et ne savaient comment réagir : Les possibilistes ? Mais qu’est ce que cela pouvait bien vouloir dire ?
Finalement, avec le temps et au vu de l’ampleur de l’initiative et de l’enthousiasme qui en découlait pour ceux qui y contribuaient, ils se sont penchés de plus près et sont venus voir, tester, pour mieux comprendre ce qui s’y jouait. Dès les premiers échanges, les élus se sont intégrés à leur manière dans le projet, ce qui a amené naturellement la municipalité à subventionner le lieu pour en favoriser le développement. Peu de temps après, dans une autre métropole, un autre lieu s’inspirant du premier fut créé. Puis un deuxième. Et puis encore un autre…. Ces îlots de résistance poétique se sont multipliés spontanément à travers le territoire tout en répondant aux besoins spécifiques des localités où ils s’implantaient.
Nous sommes en 2030 et une loi reconnaît finalement l’existence de ce que nous appelons désormais les “Jardins des possibles” et leur impact positif pour le bien commun.